La télévision comme
outil de contrôle social

Paru dans FRONT SOCIAL n°8

 

La télévision est devenu un formidable outil de propagande et de contrôle social pour l’Etat et le régime néocapitaliste. a télévision n’est en elle-même qu’un objet comme la radio, et ne peut donc être incriminée intrinsèquement. Cependant le pouvoir l’utilise pour endoctriner les masses, elle est ainsi devenue un vecteur de la diffusion des idées du gouvernement et du néocapitalisme.

La télévision comme outil de propagande

La naissance du mot propagande et de la propagande en tant que telle remonterait à 1622. La Curie romaine fonda alors la Congrégation pour la propagation de la Foi (Congregatio de propaganda fide). Cette congrégation avait le but purement hégémonique de diffuser la foi catholique avec tous les moyens possibles.

Jusqu’au début du Xxème siècle les Etats ne se sont pas intéressés à la diffusion de leur propagande vers le peuple. La propagande est entrée dans l’ère moderne avec la première guerre mondiale, pendant laquelle mensonges et trucages vont devenir partie intégrante du cours de celle-ci; c’est le fameux " bourrage de crâne ".

Affiches et cartes postales seront les principaux vecteurs du message étatiste vers le peuple.

Dans l’entre-deux guerres la main-mise de l’Etat sur la presse sera de plus en plus abrupte. Mais les intérêts financiers ne vont pas tarder, eux aussi, à entrer en jeu et se servir des moyens de communication pour faire reluire leur image.

En Italie et en Allemagne les régimes fascistes vont accaparer tous les moyens de communication pour faire la diffusion de leur doctrine. De véritables messes (on parlerait de " shows " aujourd’hui) ont été organisé pour la célébration de leur culte.

Avec la deuxième guerre mondiale la propagande va passer à un autre niveau. Le régime pro-nazi de Vichy va organiser l’exposition " Le Juif et la France "; les pays alliés de l’Allemagne vont diffuser massivement leurs idéologies antisémites et essayer de soumettre à la vindicte populaire leurs ennemis: l’URSS et les alliés des USA.

Du côté allié la diffusion de tract sera massivement utilisée, et ils seront largués par avion. Mais ils vont bien sûr également utiliser la radio, avec la mythique " Radio Londres".

Dans les deux camps le cinéma de propagande et surtout les actualités cinématographiques seront les principaux instruments de propagande. Le retournement de situation, le trucage, le mensonge feront partie de la stratégie pour donner une bonne image de l’un ou de l’autre camp et assurer au pouvoir le soutien des masses.

Après la guerre, la radio deviendra pour l’Etat le principal vecteur de propagande anticommunste. Les USA réaliseront ensuite des films où l’anticommunisme fait image de scénario, ou d’autres films qui justifient le génocide des peuples indiens avec des acteurs comme l’inénarrable raciste John Wayne.

Pendant la guerre froide les médias vont être utilisés par le régime capitaliste pour faire de l’anticommunisme primaire et justifier les interventions yankees au Vietnam, Cuba, etc.

Cependant, petit à petit radio et cinéma vont faire place à la télévision comme vecteur de l’idéologie dominante.

Propagande et manipulation

La télévision c’est l’Etat qui vous parle et dont l’image apparaît à domicile, elle est l’outil idéal pour le marketing politique et économique.

L’image que veut se donner le pouvoir est complaisamment véhiculé par les pantins télévisuels dont la seule " valeur " réside dans le semblant de télégénisme qu’ils véhiculent. Ces marionnettes ont transformé en loi cette phrase de William Randolm Heast: " Une information c’est quelque chose qui dérange, quelque chose que quelqu’un, quelque part, ne veut pas voir publié. Tout le reste n’est que publicité ".

On comprend donc par là que toute information, tout reportage, toute émission télévisée doit avoir pour but de favoriser le pouvoir, et surtout de ne pas lui nuire. Ainsi, la visite du Pape en France fut abondamment diffusée et commentée.

Mais rien ou presque ne fut fait pour la commémoration du Front Populaire ou de la Guerre d’Espagne. La guerre du golfe ne fut filmée et chroniquée que d’après l’angle américain et celui de ses alliés.

Aucun reportage ne fit réalisé sous l’angle irakien. Pendant les élections en Russie il fut perpétuellement fait l’éloge d’Eltsine, alors que les communistes ne passaient, sous l’angle journalistique, la plupart du temps que pour des gens du passé ou encore des folkloriques.

Enfin, on ne compte plus les reportages qui se font écho de " l’efficacité " de la police et donc de la sécurité et de l’ordre. Aucun reportage n’a jamais été réalisé, sans voyeurisme, sur " la haine " des cités.

Ces quelques exemples démontrent clairement de quel côté incline la prétendue objectivité du journaliste télévisuel et qui cette objectivité est censé servir.

Mais à part les " informations ", la télé ne fait que diffuser les valeurs dominantes, le culte de la marchandise, par les sitcoms, les émissions-jeux, la publicité. La télé est la célébration de la société capitaliste.

On y retrouve clairement tout ce qui historiquement a fait la propagande: l’utilisation de tous les moyens à des fins hégémoniques, la manipulation de l’information, la censure d’informations et de faits gênants pour le pouvoir, la diffusion massive et sous des formes différentes d’un même message qui légitime le pouvoir en place.

La télévision comme outil de contrôle social

La télévision est-elle un outil de contrôle social comme il y en a d’autres (drogues, sport, manifestation autorisée et encadrée, travail, alcool, marchandises...)?

En fait, il semblerait que la réponse soit négative. D’une part parce que comme nous l’avons vu la télévision est l’un des vecteurs si ce n’est le vecteur de la propagande étatique. Mais aussi, si elle est une marchandise, elle a aussi le pouvoir de diffuser et de montrer d’autres marchandises, et donc de ce fait est l’un des mécanismes essentiels de l’aliénation.

Nous avons vu dans Front Social N°2 le rôle de la marchandise dans le mécanisme de l’aliénation, nous ne reviendrons donc pas dessus.

La télévision est une marchandise parce que tout ce qui est y diffusé est fabriqué pour que le téléspectateur/la téléspectatrice paie (au travers de la redevance, des impôts, de l’abonnement) et choisisse ce qu’il veut voir; ceci rentre donc complètement dans la conception capitaliste de la société.

Mais pour que le téléspectateur/la téléspectatrice continue à acheter la marchandise télé, il faut que les programmes se renouvellent incessament, comme se renouvellent constamment les rayons et les produits des magasins.

Si les programmes se renouvellent cela aboutit à la captation du téléspectateur/la téléspectatrice, et celui-ci/celle-ci sera donc de plus en plus attiréE par l’écran pour voir de nouvelles choses, et la " magie audiovisuelle " aura fonctionné.

Mais derrière la marchandises télé on peut déceler nombre d’autres choses. La diffusion non stop d’images sur l’écran ne conduit pas seulement à capter le/la téléphile, mais aussi à ce que celui-ci/celle-ci soit vide de tout esprit critique devant ce qu’il/elle regarde. Le défilé perpétuel d’images a pour but de noyer tout esprit de contestation qui par mégarde se serait glissé à l’écran, à le vider de son contenu.

La perversité d’une telle chose conduit à la banalisation de l’image.

Ainsi la propagande fasciste de l’extrême-droite passe sans accroc entre deux nouvelles sur la Corse ou le Tour de France, on peut voir Le Pen éructer qu’il ne croit pas à l’égalité des " races " et cela n’apparaît pas plus surprenant que le dernier défilé de mode ou la victoire d’un tel à tel grand prix de formule 1.

Cela peut conduire à la passivité de la personne qui devant son écran ne jugera pas nécessaire de protester contre Le Pen, car son message ne pourra pas apparaître nocif dans le flot des informations et des images. Ceci est un premier exemple de contrôle social.

La télévision est un outil de contrôle social, comme la drogue peut en être un, et la similitude entre ces deux outils est frappante. La télé a en effet un pouvoir de psychotrope, mais un psychotrope contrôlé par le pouvoir. Il existe plusieurs variétés de drogues: calmantes, excitatives...

Il existe de même plusieurs sortes de programmes télévisuels: calmants, excitant, provoquant des troubles, etc...

On peut en effet choisir comme un rien l’émotion que l’on désire grâce à la télévision. Il suffit de zapper sur le programme voulu pour avoir des frissons, des sensations romantiques, faire sortir sa haine, etc.

Mais tout cela est est soigneusement contrôlé et régulé afin que cela ne sorte pas à l’extérieur. La sublimation de ses émotions conduità ce que les gens ne descendent pas dehors pour les exprimer. Cela aussi fait partie du contrôle social.

Nous venons de voir de quelle manière la télévision a le pouvroir d’hypnotiser quelqu’un. Mais quelle est sa véritable influence sur les gens? La télévision a-t-elle les moyens d’influencer les gens?

Souvenons-nous de la campagne électorale des présidentielles de 1995. Les sondages quotidiens donnaient Chirac gagnant. Certaines émissions politiques (et notamment sur TF1) donnaient largement la parole à droite. Bref la droite était déjà chez elle et donc à l’Elysée. Or, que se passa-t-il par la suite? Chirac fut élu président.

Utilisons un autre exemple. En pleine élection à Gardanne, les journalistes relatent l’histoire d’un éventuel financement occulte du P.C.F..

Or cela arrive alors qu’un candidat du P.C.F. s’oppose à un candidat du Front National. Seulement cette fois-ci la télévision aura loupé son coup car le " communiste " Roger Mei a finalement gagné les élections.

Mais d’autres exemples, on peut en trouver à la pelle: pendant les grèves de décembre 1995 la télévision faisait ses choux gras du " calvaire " de ceux/celles qui étaient obligé d’aller travailler.

Ceci a peut-être contribué à ce que les travailleurs du privé aient quelque antipathie envers les cheminots et ne rejoignent pas le mouvement.

Autre exemple. Il est clair que les matchs de foot se déroulent à l’heure choisie par la télévision et à une heure où tout le monde peut les regarder.

Ainsi la télévision perpétue le culte de la connerie sportive en voulant faire de l’argent par la diffusion de matchs pour lesquels elle donne de l’argent aux clubs, tout en faisant payer en retour aux publicitaires les spots diffusés pendant la mi-temps.

Ainsi les images de marchandises sont assurément diffusés massivement. A travers cela trois outils de contrôle social se conjuguent: 1-l’esprit sportif nationaliste, 2-la marchandise, 3-la télévision.

Ces exemples démontrent que la télévision, si elle est ous influence du pouvoir, peut créer elle-même son propre pouvoir qui ne servira que le pouvoir.

Car il ne faut pas considérer que la télévision soit libre. Il existe un débat qui est: " La télévision crée -t-elle l’événement ou l’événement crée -t-il la télévision? ".

La télévision est sans aucun doute créatrice d’événements qui servent les intérêts du pouvoir. Tout événement (et il y en a) qui ne passe pas à la télévision est considéré alors comme un non-évenement ou comme inexistant.

S’il existe des événements non crées par la télévision, celle-ci va faire en sorte de l’exploiter dans le sens des intérêts de la caste dominante.

S’il n’y a pas d’événements, la télévision va en créer. Ainsi les matchs de foot ou les " événements " sportifs sont considérés comme des événements parce qu’ils sont massivement retransmis par les télés.

Cela va de plus assurer une crédibilité au sport (car tout ce qui passe à la télé est crédible), et le beauf du coin n’aura plus honte de se promener en survêt’, car il ressemblera au premier chimpanzé en short mis en orbite télévisuelle. Voici donc un bon exemple de l’influence de la télé sur les gens, et dans la société.

Comme je viens de le dire, tout ce qui passe à la télé apparaît crédible.

Il est en effet banal de constater que n’existe que ce que l’on voit; ceci est vrai pour tous/toutes.

Or le pouvoir de la télé c’est aussi de partager la terre et les choses en deux. Celles qui sont censées être valable (pour l’Etat et le Capital) ont le droit de passer, les autres pas.

Or celui/celle qui croit ce qu’il voit ne cherchera jamais à aller voir ailleurs et ne croira pas que cela existe.

Combien de reportages culturels, sur la mythologie celtique par exemple, ont été passé à la télé? Combien de documentaires sur l’affaire Léonard Pelletier? Aucun.

Si l’on prend ces deux exemples et que l’on interroge les gens dans la rue, combien de personnes répondront savoir quelque chose là-dessus? Par contre si l’on demande le score du dernier PSG (pourritures de salauds gerbants)-Nantes, ils le diront sans hésiter.

Cette influence de la été, on la retrouve aussi largement dans la culture.

Tout ce qui est au " top " est plus ou moins aidé par un ou plutôt plusieurs passages à la télévision. Ceci conduit à une normalisation et à la standardisation par l’industrialisation de la culture.

Etre artiste aujourd’hui ne veut plus dire être un génie de sensibilité, mais avoir une image télégénique, et celle-ci est même devenue plus importante que l’art lui-même. Cela nous conduit à ce que le lamentable soit élevé au rang de sensationnel, et que le fantastique soit décimé.

Cela est certainement inérent à notre époque qu’Eric Cantona soit un " intellectuel ", Ophélie Winter une " artiste ", et Alain Minc un " économiste ". Le vide intellectuel, la non-pensée, l’absence de réflexion et d’esprit critique font eux aussi partie du contrôle social.

95% des foyers possédent au moins un poste de télévision qu’ils regardent en moyenne 3h30 par jour. On peut donc à travers ces deux chiffres analyser l’étendue des dégâts que cause l’influence de la télévision.

Ces 3h30 consacrées à visualiser la télé ne seront pas consacrées par exemple à la lecture d’un livre (activité autrement plus intellectuelle), mais à se vider psychiquement après le travail, et par là même à être en contact direct avec le pouvoir à travers le programme choisi.

La télévision est une fantastique vitrine de l’ordre social et un outil de contrôle social.

La télévision crée l’apparence d’exister par procuration car tout ce qui s’y présente a la forme de la vie, mais n’est pas la vie.

Car une vie standardisée et uniformisée ne saurait exister. Les images ne servent qu’à suggérer, et plus les gens vivent à travers l’écran, moins ils/elles vivent leur propre vie. Et moins ils/elles comprennent leur statut d’aliénéEs et d’exploitéEs.

Donc moins il y a compréhension de tout cela moins il ya le besoin, la nécessité d’avoir envie de se révolter. La création d’un monde virtuel télévisé ne sert en définitif que les intérêts du pouvoir. La télévision st un outil de répression psychologique bien plus fort que n’importe quelle prison.